Si « Gouverner, c’est d’abord loger son peuple » disait l’Abbé Pierre, vous, lecteur, n’êtes pas au pouvoir (à moins que !).
Or, il n’y a rien de plus déstabilisant que de voir son logement être squatté, après son retour de vacances par exemple.
Mais qu'est-ce qu'un "squatteur" juridiquement ?
C'est une personne sans droit ni titre qui est entrée dans les lieux par effraction, tromperie, menace ou violence, pour l’occuper sans autorisation de son propriétaire.
Attention, un squatteur n'est pas un locataire qui se maintient dans le logement après la fin du bail et sans l’accord du propriétaire ! Cette situation relève d'une autre procédure.
Comment déloger un squatteur ?
ETAPE N°1 : ne JAMAIS intervenir seul quand bien même le logement serait votre propriété privée. Il en va de même a fortiori si vous êtes locataire.
ETAPE N°2 : Si vous êtes certain que votre logement est occupé illégalement depuis moins de 24h vous pouvez faire intervenir la police, mais bien souvent, les squatteurs opposeront un temps d'occupation supérieur (d’autant qu’ils savent se faire discrets pendant cette période déterminante).
ETAPE N°3 : si vous vivez en copropriété, avisez le syndic en charge de la gestion de votre immeuble ainsi que vos voisins de la situation afin d'éviter toute confusion entre les agissements des squatteurs et vous.
ETAPE N°4 : rendez vous au commissariat le plus proche pour porter plainte.
Astuce : Pensez à la pré-plainte en ligne pour gagner du temps si vous pouvez le faire. Prenez des photos de votre logement s’il y a eu effraction (ex : porte/ fenêtre cassée…) et munissez vous d'une preuve que vous occupez le logement (facture d'électricité, eau, quittance de loyers...)
ETAPE N°5 : la procédure judiciaire adéquate
Contactez votre avocat en urgence ! Il vous aidera à saisir un huissier compétent pour faire constater la situation. Le procès-verbal de constat sera une preuve qui fera foi jusqu’à inscription de faux.
A ce stade, deux hypothèses possibles :
- Soit l’huissier aura accès aux lieux et/ou sera autorisé par l’occupant à dresser son constat de sorte que son identité sera connue ;
- Soit l’huissier n’y aura pas accès et votre avocat pourra solliciter par voie de requête l’autorisation permettant à l'huissier d'entrer dans les lieux et de réaliser le constat
Ensuite, une procédure d’urgence simplifiée appelée « l’assignation en référé » devant le Juge du contentieux de la protection du tribunal judiciaire (pôle proximité) du lieu de situation du logement devra être initiée.
Astuce : Pour éviter un renvoi intempestif et qui fera perdre du temps au demandeur, je fais signifier l’assignation et les pièces du dossier aux squatteurs en un seul acte.
En cas d’extrême urgence, votre avocat saura mettre en œuvre la procédure de « référé d’heure à heure ». Cette procédure permet d'obtenir une décision dans des délais très courts (une à deux semaines).
ETAPE N° 6: déloger les squatteurs (exécution de la décision)
Muni du jugement, il faudra faire signifier le jugement aux squatteurs par voie d’huissier.
A compter de cette signification, les squatteurs auront un mois pour quitter le logement.
La trêve hivernale (du 1er novembre 2021 au 31 mars 2022) n’est pas applicable au bénéfice d’un squatteur.
S’il se maintient dans les lieux, l’huissier délivrera un commandement de quitter les lieux et les squatteurs devront quitter les lieux sans délai (art L 412-1 du Code de procédures civiles d’exécution)
En tant que de besoin, l’huissier devra demander au préfet le concours de la force publique pour déloger les occupants.
Astuce : pensez à renforcer les systèmes de sécurité de votre maison après avoir repris possession de votre logement !
Mon devoir de conseil m’oblige à vous rappeler que :
Outre d'autres infractions pouvant être constatées, un squatteur peut être puni :
d'1 an d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende pour être entré dans le logement
et d'1 an d'emprisonnement et de 15 000 € d'amende pour avoir occupé ce logement.
Par ailleurs, il existe depuis une procédure extrajudiciaire applicable au résidences principales et secondaires dont les étapes sont les suivantes : 1) porter plainte 2) prouver la propriété du logement 3) faire constater par un Officier de Police Judiciaire que le logement est squatté.
En théorie, si vous avez réussi à obtenir le déplacement d’un OPJ sur place, il faudra ensuite demander au préfet de mettre en demeure les squatteurs de quitter le logement.
Le préfet aura alors 48 heures à partir de la réception de la demande pour rendre sa décision mais il pourra tout à fait refuser votre demande…
Une autre difficulté réside dans le fait que cette procédure n'est applicable que dans les 3 premiers jours de l'occupation par les squatteurs, lesquels sauront se montrer très discrets pour faire surface le quatrième...
***
Voici une décision rendue par le Tribunal Judiciaire de Montpellier, le 5 août 2021, en référé d'heure à heure :
« L'occupation sans droit ni titre d'un d'immeuble constitue un trouble manifestement illicite que le juge des référés se doit de faire cesser si elle est avérée. L'action en référé est donc recevable (...)
Il ressort du constat d'huissier de justice du XXXX; que la pénétration s'est faite par voie de fait, notamment du fait des dégradations constatées sur la porte de sorte qu'il y a lieu d'exclure l'application des délais prévus par les articles L 412-1 et L 412-6 du Code de procédures civiles d'exécution
PAR CES MOTIFS
(....)
ORDONNONS l'expulsion de M. X et de tous occupants de son chef (...)» .
Votre avocat pourra vous conseiller et évaluer quelle sera la procédure la plus adéquate selon votre situation.
Pour plus d'informations à ce sujet n'hésitez pas à me contacter !
Maître Jérémie OUSTRIC
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